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Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le contrôle fiscal... à l'heure du big data

Sommaire

Cauchemars des fraudeurs, Père Fouettard des contribuables et soldats des finances publiques, les contrôleurs du fisc opèrent selon un process de plus en plus efficace grâce au big data

Or, les contrôles pourraient bien se multiplier en cette fin d’année et au début de la suivante... Si le “quoi qu’il en coûte” a ouvert les robinets financiers, cette générosité pourrait en particulier revenir en boomerang vers ceux qui auraient fait des déclarations erronées et auraient bénéficié, peut-être indûment, de l’aide exceptionnelle Covid… 

Oups ! Le droit à l’erreur

Vous avez forcément croisé, lors de votre déclaration fiscale mensuelle ou trimestrielle, ce fameux “Oups”. Un bouton sur lequel il suffit de cliquer pour pouvoir modifier sa déclaration jusqu’à peu de temps avant la clôture. 

Car l’État reconnaît à ses ouailles le droit à l’erreur ! L’administration fiscale cherche ainsi à ne pas stigmatiser les contribuables ou cotisants de bonne foi ou ayant une méconnaissance de la loi… pour mieux traquer les fraudeurs

Une chasse qui devrait connaître une embellie en 2023, d’autant que le gouvernement a particulièrement besoin de renflouer ses caisses !

oups.gouv.fr

Une question de droits

La loi définit les droits de chacune des parties concernées: le contribuable d'un côté et l’administration fiscale de l'autre. 

Les droits de l’administration fiscale 

Lors du déclenchement d’un contrôle fiscal, l’administration peut s’appuyer sur un certain nombre de droits dont :

  • le droit de communication : elle peut demander au contribuable, ainsi qu'à des tiers tels des fournisseurs, de lui transmettre tous types de documents qu’elle juge nécessaires ;
  • le droit d’enquête : en matière de TVA, le fisc peut enquêter sur des manquements aux règles de facturation des professionnels soumis à la TVA ;
  • le droit de rectification : l’administration fiscale a le droit de rectifier les déclarations effectuées et demander le paiement de l’impôt supplémentaire dû.

Les droits du contribuable

Le contribuable contrôlé dispose lui aussi de droits énumérés par l’administration fiscale :

  • le droit d’être informé d’un contrôle sur place avant l’intervention de l’administration et de se faire assister d’un conseil de son choix (comptable, fiscaliste...) ; 
  • le droit à un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ; 
  • le droit à l’information sur les conséquences financières dans la proposition de rectification ; 
  • le droit à la limitation de la durée de la vérification sur place des petites entreprises à 3 mois (sauf si la comptabilité présente de graves irrégularités) ; 
  • le droit à la garantie fiscale, c’est-à-dire à l’impossibilité pour l’administration de procéder à un nouveau contrôle sur des points déjà examinés lors d'un contrôle et qui n'ont pas fait l'objet de rectification ;
  • le droit de réponse : la loi accorde 30 jours au contribuable pour répondre à la proposition de rectification, à compter du lendemain de sa réception. Sur demande, ce délai peut être prolongé de trente jours supplémentaires. Ce droit de réponse peut cependant être supprimé en cas de mauvaise volonté avérée de la part du contribuable.

Qu’est-ce qui déclenche un contrôle?

La déclaration de revenus transmise par le contribuable sert de base au déclenchement d’un contrôle fiscal. Au-delà de l’absence pure et simple de déclaration ou de chiffres aberrants, ce sont surtout les incohérences et les anomalies qui tirent la sonnette d’alarme.

Une affaire de cohérence

Les différences entre les éléments déclarés et les renseignements dont dispose l’administration ou les incohérences dans les données fournies par le contribuable constituent un efficace système de détection.

Ainsi, pour la période Covid, la comparaison entre les sommes perçues déclarées mensuellement ou trimestriellement par les entrepreneurs et les montants notés sur les formulaires de demande de fonds exceptionnel Covid risquent en effet de révéler des décalages révélateurs. Un travail de cohérence facile pour les robots informatiques de l’administration fiscale !

Des anomalies par rapport à des valeurs de référence

Des déclarations qui font apparaître l’entreprise très en deçà des résultats escomptés par rapport à des entreprises comparables, du même secteur d'activité et dans le même secteur géographique, peuvent également donner l’alerte.

Des tables de cohérence

Le fisc dispose en effet d’informations précises et solides sur le fonctionnement de chaque secteur d’activité, comme la présence et le pourcentage de cash, les chiffres d’affaires moyens, la part des achats, les tarifs moyens pratiqués, les charges, les volumes courants d’achats et de ventes... Des tables de cohérence servent de fil rouge aux inspecteurs. Et une entreprise s’éloignant trop de ces valeurs de référence risque d’allumer une lanterne rouge dans la machine fiscale.

Pas besoin de preuves en cas de grand écart

Même s’il n’y a pas de preuve, une trop grande différence entre les éléments comptables d’une entreprise et ce qui est officiellement référencé pour son activité et sa localisation peut donner lieu à une taxation d’office, par extrapolation des résultats.

La dénonciation

La dénonciation fait bien partie des déclencheurs de contrôles fiscaux, même s’il est difficile de connaître exactement sa part dans le lancement des procédures… et dans leur aboutissement. Ceux qui sont surnommés les “aviseurs” seraient même rémunérés pour leur action.

Le hasard…

Croyez-vous, parce que vous êtes un petit autoentrepreneur discret et honnête, dont le chiffre d’affaires n’excède pas 15 000 euros voire 20 000 euros à l’année, que vous êtes à l’abri d’un contrôle? Que nenni ! Si les contrôles sont déclenchés par détection d’anomalies, par dénonciation, une part se fait en effet de façon aléatoire.

Pourquoi donc? Par équité de traitement entre toutes les entreprises, l’administration fiscale tire au hasard des entreprises à contrôler, même sans anomalie 

Des moyens ultra sophistiqués 

La lutte contre la fraude profite pleinement de l’essor des technologies numériques : intelligence artificielle, algorithmes, datamining, textmining… Sans compter l’acquisition de données auprès d’entreprises privées et le décloisonnement de centaines de bases de données (revenus transmis par les employeurs, les organismes sociaux, mais aussi comptes bancaires, contrats d’assurance vie, actes notariés, données du patrimoine, informations cadastrales, données des opérateurs de téléphonie, etc…) en France et à l’étranger. Une vaste toile d’araignée qui se densifie peu à peu. Les contrôles Urssaf se sont eux aussi mis au big data.

Un méga système informatique

Si la recherche des incohérences ne date pas d’hier, le fisc dispose aujourd’hui d’un outil informatique surpuissant. Des algorithmes de détection, de plus en plus performants, croisent les informations de toute nature, ce qui représente des centaines de millions de données, et traquent la moindre anomalie. 

Ainsi, une adresse d’établissement non connue par l’administration, mais trouvée sur internet va déclencher un signal d’anomalie et donc une recherche pour vérifier s' il y a fraude ou simplement oubli de radiation d’un ancien établissement.

Le gouvernement poursuit l’objectif de fixer, à court terme, la part des contrôles fiscaux ciblés par l'intelligence artificielle et le datamining à 50%. 

La Mission requêtes et valorisation de la DGFiP

Ce service MRV qui prend une place croissante dans le déclenchement des contrôles fiscaux, traite plus de 200 téraoctets (To) de données. 

Plusieurs équipes sont assignées à gérer la plateforme informatique et les flux de données, à les analyser à partir de techniques mathématiques et statistiques, puis à élaborer les requêtes visant les fraudes et développer des techniques d’analyse prédictive… En bref, des geeks surdoués sont aux manettes !

Modéliser le profil du fraudeur

La MRV travaille aussi à modéliser les comportements frauduleux. Sur la base des caractéristiques issues des fraudes avérées, cette modélisation vise à dresser le profil type du fraudeur. Ce profil sera ensuite appliqué à la population ciblée, pour déceler des comportements identiques.

Le textmining

Ce terme désigne le traitement de données non structurées, en clair des textes ou des images. C’est sur ce principe que plusieurs départements ont récemment expérimenté le croisement entre les déclarations des contribuables, les prises de vues aériennes et les plans de cadastre, révélant les piscines ou constructions non déclarées.

Les données des réseaux sociaux

Dans la masse des données arrivant dans l’escarcelle du fisc figurent aussi des informations en provenance des réseaux sociaux. 

L’article 154 du projet de loi de finances n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 a en effet autorisé, à titre expérimental pour trois ans, la DGFiP et la DGDDI (Direction générale des douanes et droits indirects) à collecter et exploiter les données rendues publiques sur les sites internet des opérateurs de plateforme en ligne, réseaux sociaux (Facebook, Instagram, Twitter,...) et les plateformes de services entre particuliers (tels Airbnb, BlaBlaCar, etc.). Cette expérimentation devra aussi faire l'objet d'une analyse d’impact relative à la protection des données (AIPD) et soumise à la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés).

Tout ce qu’un utilisateur met en ligne sans filtres (commentaires, annonces, photos et vidéos) est donc pour l’instant récupéré par les algorithmes de l'administration fiscale : ces informations peuvent alerter sur un train de vie incohérent avec les revenus déclarés ou bien mettre en évidence une activité non déclarée. Le principe sera-t-il avalisé et pérennisé? A suivre…

Le Ficoba : une mine d'informations 

Ficoba est l’acronyme de Fichier national des comptes bancaires. Ce mégafichier recense tous les comptes bancaires ouverts ou clos depuis moins de 10 ans en France ainsi que les coffres-forts loués. Nourri et soigneusement mis à jour par les banques, il est placé sous la responsabilité de la DGFIP (Direction générale des finances publiques). Si le solde et les opérations effectuées n’apparaissent pas dans le Ficoba, l’identité du propriétaire, le nom de la banque, les références du compte ainsi que les informations de modifications ou de clôture du compte y sont précisées. 

Une manne pour les enquêteurs dans la lutte contre la fraude ! L’administration fiscale mais aussi la police, les officiers de justice, les magistrats, les notaires, les banques et les organismes de Sécurité sociale (telle la Caf) ont en effet accès à ce fichier. 

Attention : cet accès est très contrôlé, organisé en différents niveaux d’habilitation selon le statut et l’activité antifraude des agents et de lourdes sanctions sont prévues en cas d’usage abusif ! 

Les agents habilités peuvent obtenir ainsi la liste des comptes d’une personne ou d’une société et doivent faire ensuite, si besoin, une demande auprès des banques dans le cadre du droit de communication pour obtenir les relevés de compte (sur 3 à 5 ans).

Le fichier permet de traquer le travail dissimulé, la fraude aux prestations sociales en vue d’une éventuelle révision des droits ou encore trouver l’adresse d’une personne. 

Le déroulé d’une procédure de contrôle fiscal

Pour déclencher un contrôle fiscal auprès d’un professionnel, l’administration fiscale doit transmettre un avis de vérification au contribuable par lettre recommandée au moins deux jours avant le contrôle. Cet avis doit mentionner les années contrôlées et le droit qui est donné au contribuable d’être assisté d’un conseil.

La vérification de comptabilité

Ce contrôle appelé “vérification de comptabilité” permet à l’administration fiscale de vérifier les déclarations d’impôt du professionnel en les comparant à sa comptabilité.

À l'issue du contrôle, le fisc dispose de trois ans pour rectifier les déclarations de l’entreprise et la redresser.

Quels sont les éléments contrôlables pour un auto-entrepreneur?

En tant qu’auto-entrepreneur, la gestion comptable est extrêmement simplifiée. Elle se résume aux factures, au livre de recettes et au livre des achats pour les micro entreprises en BIC.

  • Les contrôles opérés par l’administration fiscale s’appuient sur la cohérence entre les différents éléments, en particulier les éléments comptables et les sommes déclarées sur les comptes bancaires.
  • L’auto-entrepreneur doit disposer d’un compte bancaire séparé si son chiffre d’affaires dépasse 10 000 euros 2 années de suite.
Bon à savoir : une auto entreprise étant par définition une entreprise individuelle, l’État a la possibilité de contrôler aussi le compte personnel. Des sommes non justifiées sur le compte personnel peuvent donc faire l’objet d’un redressement.

L’avis de rectification

À la suite d’un contrôle fiscal, l’administration fiscale peut adresser un avis de rectification si elle estime que les déclarations du contribuable ne sont pas correctes. 

Cet avis expose par écrit les redressements envisagés par le fisc à l’égard du contribuable.

30 jours pour s’opposer

L’avis de rectification informe également le contribuable qu’il dispose d’un délai de 30 jours pour s’opposer au redressement.

Sans réponse dans le délai de 30 jours, la proposition de rectification est considérée comme validée.

  • Si le contribuable ne s’oppose pas, il doit s’acquitter de l’impôt dû supplémentaire signalé par un avis d'imposition avec une date limite de paiement.
  • Si le contribuable s’y oppose, il doit donc formuler ses observations dans un délai de 30 jours.

À la réception de ces observations, les deux parties négocient pour trouver un accord. 

À défaut d’accord, chacune des deux parties peut saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.

Quels recours sont possibles?

En cas de litige avec l’administration fiscale, le contribuable peut saisir le conciliateur fiscal départemental en vue de trouver une solution amiable. 

Cette saisine doit avoir été précédée d’une première démarche auprès du service local. Et le demandeur doit détenir la preuve (un courrier par exemple) de cette démarche.

La loi Essoc : une récompense à la régularisation

Cette loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, dite loi Essoc, offre au contribuable de régulariser sa situation de façon spontanée en échange d’une réduction de 50 % du montant des intérêts de retard. En cas de régularisation pendant le contrôle fiscal, le contribuable peut bénéficier dans les 30 jours qui suivent l’examen sur pièces d’une remise de 30 % des intérêts de retard.

Les délais de prescription

La possibilité pour l’administration fiscale d’effectuer un contrôle fiscal est limitée dans le temps. Au-delà d’un certain délai, appelé délai de prescription, le contribuable ne peut plus faire l’objet d’un contrôle :

  • Pour l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés, le contrôle porte sur l’année en cours et les trois années précédentes (ce délai est porté à 10 ans en l’absence de déclaration).
  • Pour la TVA, l’administration peut exercer un contrôle sur les trois ans précédant l’année au cours de laquelle la taxe est devenue exigible.
A noter : le fait d’avoir bénéficié d’une aide de l’État porte la durée de rétroactivité de 3 à 5 ans. Ainsi, en 2023, les entrepreneurs ayant bénéficié d’une aide pourront être contrôlés en remontant jusqu’à l’année 2018.

Comment se passe concrètement un contrôle fiscal?

Deux possibilités : un contrôle sur pièce (en interne) ou sur place, soit chez l’entrepreneur, soit chez son comptable pour les entreprises qui en possèdent. Ce contrôle peut cibler une aide, un impôt et/ou une période.

Le contrôle sur pièces 

L’administration fiscale procède à un examen de conformité et de comptabilité depuis ses bureaux. Elle opère un recoupement entre les déclarations faites par le contribuable et les différents autres documents à sa disposition, telles que les informations fournies par l’employeur, l’Urssaf, la Caf, etc.

Pour les auto entrepreneurs, le fisc va comparer la cohérence entre les déclarations Urssaf et les déclarations de revenus.

Le contrôle sur place

Il consiste en une confrontation, sur place, des déclarations souscrites par l'entreprise et de ses écritures comptables

Le contrôle sur place peut être annoncé ou, dans certains cas plus rares, inopiné (par exemple un contrôle de caisses enregistreuses, ou un contrôle des entrées d’un lieu accueillant du public). 

Déplacement d’un contrôleur : une affaire de rentabilité

Mais le fisc a aussi un objectif de rentabilité de ses services. Pour qu’un inspecteur du fisc se déplace, il faut qu’il ait une forte présomption de fraude ou de préjudice pour l’administration fiscale et que l'éventuel redressement soit "rentable". Car le déplacement d’un expert représente un coût certain ! 

La bonne attitude

Si vous vous retrouvez avec un contrôleur chez vous, adoptez la bonne attitude ! Ne perdez jamais à l’esprit que vous êtes face à un être humain, qui fait son travail et doit répondre aux objectifs qui lui ont été fixés par son administration. La bonne attitude est tout simplement d'être respectueux et de bonne foi !

Car il est déjà arrivé qu'un inspecteur reçoive des cadeaux contre son gré… ou qu'il soit relégué dans un réduit sombre et puant avec les documents comptables ! Si un agent vérificateur est mis dans l’incapacité de faire son travail dans des conditions normales ou s'il subit une agression physique ou verbale, des sanctions pénales sont d'ailleurs prévues...

Pour ceux qui veulent pénétrer dans les arcanes du contrôle fiscal et de la lutte contre la fraude, consultez le passionnant rapport du Sénat de juillet 2020 sur L’adéquation des moyens humains et matériels aux enjeux du contrôle fiscal : une évaluation difficile, une stratégie à clarifier.

 

 

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