fbpx Fonds de solidarité : Coup de massue pour les indépendants
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Coup de massue pour les indépendants

Sommaire

Les indépendants sont lâchés par l'assurance maladie qui les prive de leurs droits en pleine pandémie, et par le gouvernement qui reprend d'une main ce qu'il a donné de l'autre.

Le diable se cache dans les détails, c’est bien connu ! La lecture du décret publié le 13 mai 2020 à propos du fonds de solidarité ne déroge pas à la règle. Il vient assombrir le quotidien des travailleurs indépendants dont l’avenir est bien incertain. Ils devront rembourser une partie de l’aide du fonds de solidarité déjà touché, s’ils ont perçu des indemnités journalières en avril. Et pourtant, seulement 46% d’entre eux ont pu reprendre leur activité post confinement, selon la dernière enquête de conjoncture faite par la FNAE.

Ce que dit le décret du 13 mai 2020 sur le fonds de solidarité

« Pour les personnes physiques ayant bénéficié d'une ou de plusieurs pensions de retraite ou d'indemnités journalières de sécurité sociale au titre du mois d'avril 2020 et les personnes morales dont le dirigeant majoritaire a bénéficié de telles pensions ou indemnités, le montant de la subvention est réduit du montant des retraites et indemnités journalières perçues ou à percevoir au titre du mois d'avril 2020. » ;

Cette nouvelle version du décret vient donc en opposition à la précédente version du décret en date du 16 avril : « Les personnes physiques ou, pour les personnes morales, leur dirigeant majoritaire ne sont pas titulaires, au 1er mars 2020, d’un contrat de travail à temps complet ou d’une pension de vieillesse et n’ont pas bénéficié, au cours de la période comprise entre le 1er avril 2020 et le 30 avril 2020, d’indemnités journalières de sécurité sociale d’un montant supérieur à 800 euros ; »

Un contexte compliqué : les problèmes des indépendants avec la CPAM

Cette grave mesure du gouvernement, très mal vécue par les indépendants eux-mêmes, est l’occasion de faire un premier bilan du passage au régime général de tous les indépendants depuis le 1er janvier 2020.

Force est de constater que depuis le 1er janvier les problèmes s’accumulent pour les indépendants depuis qu’ils ont rejoint le régime général : Le havre de paix n'en n'est pas vraiment un...

  • Les droits maternité des indépendantes ne sont pas accordés : le délai annoncé est de plusieurs mois, justifié par les salariés de la CPAM qui évoquent des problèmes informatiques. On a ainsi vu en plein confinement, des indépendantes totalement désemparées ayant déjà accouché sans avoir vu la couleur d’un début de prise en charge !
  • Les indemnités journalières pour garde d’enfants tardent à être versées, un grand nombre n’ont toujours pas reçu leurs IJ pour le mois de mars. Les retards moyens sont de deux mois.
  • Un problème avec la mise à jour des dossiers depuis le passage à la CPAM : pour certains le nom de leur médecin traitant a disparu, ce qui fait que les frais médicaux ne sont pas remboursés : cherchez l'erreur...
  • Un problème de procédure apparaît dans les documents demandés : les gestionnaires de certaines CPAM demandent des bulletins de salaire aux indépendants pour percevoir leurs IJ. Or, on sait tous que les bulletins de salaire n’existent pas quand on est travailleur indépendant ! sauf en caisse primaire....
  • Les indépendants qui ont un accident dans le cadre de leur activité ne bénéficient pas d’une prise en charge de leurs soins alors que c’est un droit. Ceci est une conséquence d’un mauvais fléchage en interne : la CPAM analyse d'abord l'arrêt de travail sans se préoccuper du statut du demandeur, qu'il soit indépendant ou salarié. La demande est ainsi transmise au service gérant les accidents du travail, qui rejette la demande. Hors la notion d'accident de travail n’a jamais existé chez les indépendants, c'est une notion propre aux salariés. La protection des indépendants est différente et spécifique : s’ils ont un accident (que ce soit dans le cadre de la vie courante ou leur travail) ils sont pris en charge ! Telle est la règle !

Les travailleurs indépendants ne supporteront pas longtemps d’être assimilés à des salariés, et c’est d’autant plus difficile à vivre que les choses étaient rentrées dans l’ordre avec la création de la Sécurité sociale des indépendants : ils vivent un vrai retour en arrière sur le respect de leurs droits !

Une mesure inacceptable pour de multiples raisons

Dans ce contexte, cette mesure de rembourser une partie de l’aide du fonds de solidarité déjà touché, si des indemnités journalières ont été perçues en avril, dans un tel contexte ou les droits des travailleurs indépendants sont baffoués, est inacceptable. 

Un mélange incongru

D’abord parce qu’en fermant les écoles, le gouvernement a demandé aux parents de garder leurs enfants et mis en place des indemnités journalières pour garde d’enfants. Il faut rappeler que les travailleurs indépendants qui ont obtenu ces IJ n’ont pas demandé à garder leurs enfants, les indemnités journalières viennent en compensation de la perte de revenu car ils ne peuvent travailler. 

Ensuite, le fonds de solidarité représente une compensation pour l’entreprise qui n’a pu exercer son activité, non pas parce que l’enfant ou les enfants du travailleur indépendant sont au domicile, mais parce que son activité a été mise au point mort et parfois même de manière admnistrative.

Mélanger les indemnités journalières et l’aide du fonds de solidarité était déjà un mélange des genres douteux, mais le premier décret était ainsi rédigé.

Un montant très faible

De plus, pour les auto entrepreneurs ces indemnités journalières varient entre 5,46 et 56,35 euros par jour. Rappelons que le chiffre d’affaires moyen de l'auto entrepreneur est de 1333 euros, ses indemnités journalières sont en moyenne de 10,95 euros, soit pour un grand nombre un montant qui approche des 328 euros par mois ! Faut-il vraiment leur retirer ça ?

S’attaquer ainsi aux travailleurs indépendants, c’est déroutant, injuste, indigne et surtout gagne-petit : on l’a vu le montant des indemnités journalières des indépendants et surtout des auto entrepreneurs sont réduites à peau de chagrin.

Une pratique pas assumée

D’autre part, il est fort de café de dire, seulement le 13 mai que les règles du mois d’avril ont changé et ce sans effet d’annonce : que ce soit la direction de la DGE (direction générale des entreprises), la secrétaire d’Etat Agnès Pannier Runacher, la ministre du Travail Murielle Pénicaud. Silence radio : aucun responsable politique ou aucun haut fonctionnaire n’a fait d’annonce, laissant les intéressés s’en rendre compte par eux-mêmes… Une pratique déroutante et fourbe.

Une mise en oeuvre impossible

Enfin, la mise en oeuvre laisse songeur. En décidant de changer le dispositif avec effet rétroactif, il faut imaginer les démarches qui vont avec : d’un point de vue technique, il est impossible à l’indépendant de corriger sa déclaration, voire de déclarer ses indemnités déjà perçues. Quand on peut ajouter de la complexité, ne nous privons pas !

Pour résumer, il faut rappeler :

  • Que les indépendants et surtout les autoentrepreneurs sont couverts en terme d’indemnités journalières à proportion de leurs revenus, qui sont souvent faibles
  • Qu’ils ne peuvent pas corriger leur déclaration pour le fonds de solidarité et indiquer qu’ils ont eu des indemnités journalières (sous réserve qu'ils aient pu les percevoir compte tenu des comportements des caisses primaires)
  • Que les indépendants ne doivent pas être sacrifiés par le comportement de l'Etat qui reprendre d'une main ce qu'il a donné de l'autre, pour faire des économies de bout de chandelle
  • Que cette mesure n’est ni annoncée ni assumée, prenant ainsi les gens au dépourvu et pouvant les mettre dans des situations encore plus précaires
  • Que la FAQ du fonds de solidarité n’est toujours pas à jour et ne reprend pas ce point, ce qui rajoute à la confusion

Chez les indépendants, la coupe est pleine : stress lié à l’absence de revenus provoqués par le confinement, inquiétudes sur les modalités du fonds de solidarité, exclusions qui ont laissé une partie d’entre eux sur le carreau (retraités, nouveaux créateurs), incertitude pour la reprise de leur activité, formations rendues impossibles pendant le confinement (CPF toujours vide alors qu'il devrait alimenter fin avril).

C'est pourquoi, nous appelons le gouvernement à changer cette mesure en particulier et à mieux considérer de façon plus générale ce pan de l’économie que nous représentons, nous les indépendants.

 

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